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lundi 24 avril 2017

Noël Jézéquel, un pionnier de l'histoire de Plovan

Notre association fêtera, en 2017, ses vingt ans d'existence. Deux décennies mise au service de la promotion du patrimoine et de l'histoire locale. Un autre anniversaire, plus triste, est passé inaperçu en mars dernier : il y a 100 ans, disparaissait un des pionniers de l'histoire de Plovan. Noël Jézéquel (1879-1917), vicaire de la paroisse, fut en effet, au début des années 1910, l'un des premiers, si ce n'est le premier, à s'intéresser à l'histoire de notre petit territoire. En son hommage, nous revenons ici sur son parcours et nous diffusons pour la première fois son travail, modeste il est vrai mais précieux pour la mémoire de Plovan.
 
I – Un prêtre léonard lancé sur les traces du passé plovanais

En marge de nos recherches concernant l'école des Sœurs de Plovan, nous avons découvert un curieux cahier glissé dans le journal paroissial tenu par Jean-Marie Maréchal, recteur de Plovan entre 1910 et 1941. Pour comprendre ce qui suit, il faut savoir que les prêtres en charge d'une paroisse devaient autrefois tenir un « registre paroissial » comprenant deux parties :
  • une « partie historique », retraçant l'histoire de leur paroisse depuis les origines, de son clergé et des œuvres qui y sont menées
  • et un « registre journal », répertoriant au fil des semaines ou des mois les principaux événements religieux, les accidents, les phénomènes météorologiques... qui marquent la vie de la paroisse
À cet effet, des registres vierges standards sont fabriqués par l'imprimerie de Kerangal, à Quimper, pour l'ensemble des paroisses du diocèse de Quimper et Léon, à charge pour les recteurs de les compléter manuscritement.
Le cahier qui nous intéresse ici a été arraché dans un de ces registres vierges et glissé dans un autre. Il compte simplement sept pages manuscrites. Deux écritures différentes sont reconnaissables : les six premières pages d'une écriture inconnue ; la dernière de la main du recteur Maréchal.

Page du cahier où l'on passe d'une écriture à l'autre


On peut affirmer, sans trop de risque, que la première écriture est celle d'un prêtre ayant collaboré plusieurs années avec le recteur Maréchal : Noël Jézéquel, vicaire de Plovan entre 1909 et 1914.


Noël Laurent Jézéquel est né à Plouguin, près de Ploudalmézeau, au cœur du Léon, le jour de Noël 1879. Son père, Jean Martin Jézéquel, est alors marin d’État, tandis que sa mère, Françoise Jétain, est ménagère. Noël est l'aîné d'une fratrie comptant deux autres garçons (Auguste et Joseph, nés en 1881 et 1884). La famille vit au bourg communal de Plouguin (1881-1886) avant de s'installer au château de Penmarc'h (1891-1911), en Saint-Frégant, près de Lesneven. Le père de famille, désormais militaire en retraite, y a été embauché comme garde particulier par le général de Montarby, propriété des lieux. Le domaine est acquis en 1922 par la ville de Brest qui y installe une colonie de vacances pour les enfants de familles nécessiteuses.


Château de Penmarc'h en Saint-Frégant, où vivent les Jézéquel


Le parcours de ce prêtre léonard est très classique : après des études au collège de Lesneven, Noël Jézéquel entre au Grand Séminaire de Quimper. L'étudiant ecclésiastique échappe au service militaire en 1900 et 1901 mais pas en 1902. Sa faible santé lui vaut d'être affecté aux services auxiliaires. Ordonné diacre en 1904, il devient prêtre le 25 juillet 1905. Il retourne alors vivre chez ses parents au château de Penmarc'h (présent en avril 1906).

Le 2 février 1909, plus de trois ans après son ordination, il reçoit sa première affectation : vicaire à Plovan, où il vient remplacer Jean-Noël Gloaguen (1871-1909), mort le 29 janvier précédent. Il assiste quelques mois le vieux recteur Carval, qui décède à son tour en décembre 1909. À partir de janvier 1910, il entame une collaboration de près de cinq ans avec le nouveau recteur, Jean-Marie Maréchal.

Le recteur Maréchal et probablement son vicaire, Noël Jézéquel, accompagnés d'un jeune bigouden, devant le porche de l'église de Plovan, vers 1910-1914 (photographie de Jacques de Thézac, coll. Musée breton)


 
C'est sans doute sur ordre de ce dernier que Noël Jézéquel est contraint de se pencher sur l'histoire de Plovan, aux environs de 1912. Car si le recteur Maréchal se charge effectivement de tenir le « registre journal », il confie à son vicaire le soin de rédiger la « partie historique ». Pour le guider dans sa tâche, une liste de « sources à consulter » est imprimée au début du registre.

 

 

Consignes du registre paroissial


 
Mais la paroisse de Plovan ne disposant pas, dans les années 1910, d'une bibliothèque suffisamment fournie pour effectuer ces recherches, le vicaire Jézéquel s'adresse à un ancien camarade de Séminaire, demeurant à Quimper, mieux à même que lui de se rendre à la bibliothèque municipale ou aux archives. Après plusieurs sollicitations postales, signes de la relative angoisse qui s'est emparée du vicaire face au travail qu'il doit accomplir, son ami prêtre lui répond ceci :

« Quimper, 3 mai 1912

Mon cher Noël,

J'ai, tout d'abord, à te prier de m'excuser de t'avoir fait attendre si longtemps. Je dois cependant, à la vérité, d'avouer que je n'ai nullement perdu de vue ta première lettre, et qu'à mes moments de loisir, j'ai fait des fouilles 1°) aux archives départementales ; 2°) à la bibliothèque de la ville ; 3°) à l'évêché. Je suis obligé, à mon grand regret, de reconnaître que le résultat de mes recherches est bien mince ! C'est, trop souvent, à cette sorte de déception qu'il faut s'attendre quand il s'agit de documents historiques sur des faits peu connus ou des coins à peu près ignorés. Une conclusion s'impose, dès maintenant : Plovan, « comme les peuples heureux », ne doit guère avoir d'histoire... du moins dans les papiers et registres de Quimper...

Aux archives et à la bibliothèque, rien ! De Mr Peyron [archiviste diocésain], je ne tiens que les renseignements suivants et il m'a dit que tu n'as pas à compter beaucoup sur d'autres éléments d'information.

a) La première chose que tu as à faire, pour être en règle, c'est de consigner sur ton cahier de paroisse les noms connus des recteurs de Plovan que tu relèveras dans les registres de la fabrique. Si tu le désires, il peut te procurer les noms de quelques recteurs antérieurs à 1600 et que tu ne trouveras pas probablement.

b) 1° Pour les monuments, consulter ton livre « Des églises du Finistère » de Mr Abgrall ; 2° la publication de Mr Duchâtelier (interrompue) sur les églises du Sud-Finistère, magnifique ouvrage dont il y a un exemplaire (en fascicules disparates) à l'évêché.

Voici quelques indications rapides :
Plovan 1°) modeste église du 16e siècle... (description...) 2°) belles ruines de la chapelle de Languido. Style de l'époque du XIIe siècle. Sur un tailloir qui se trouve à terre on peut déchiffrer l'inscription suivante : « Guillelmus canonicus et Ivo de Revesco aedificaverunt istam ecclesiam ».      

La chapelle possède une jolie rose du XVe siècle. Les piles et arcades sont du style de l'église de Pont-Croix (cf. Pont-Croix, chanoine Abgrall). Rem. Détail que j'ai omis et qui permet de dater la chapelle... Le chanoine Guillaume est indiqué comme étant attaché à la cathédrale de Quimper de 1162 à 1166 (cartulaire de la cathédrale).

Tu pourrais consulter également « le Finistère pittoresque » de Mr Toscer qui doit faire mention de Languido.

Les confrères du canton doivent, à défaut de toi-même, posséder les livres que je t'ai signalés.

Reste alors l'ensemble des vieux papiers du presbytère que tu pourras dépouiller tout à ton aise : « rien ne presse, dit Mr Peyron ; dites à Mr Jézéquel qu'il faut qu'il prenne beaucoup de temps pour mener son travail à bout... et encore, et encore, il n'est pas sûr de trouver grand chose ! Qu'il ne se déconcerte pas pour si peu ! Il est évident que – à moins de documents nouveaux – il ne découvrira rien d'extraordinaire concernant Plovan. Pour moi, je n'ai rien d'intéressant, par ailleurs, à lui communiquer, sauf les noms de quelques anciens recteurs... Mais voilà, ajouta-t-il en riant, on est jeune et on voudrait déblayer toutes les ruines pour qu'elles racontent d'elles-mêmes leur histoire. »

Tu vois, mon cher Noël, que tu n'as pas, comme on dit, à te manger les sangs et Monseigneur sera le premier à louer la sagesse de tes patientes recherches. Il suffit que tu « fasses quelque chose », comme tu l'observes toi-même, dans ta dernière lettre.

Tu pourrais, peut-être, recueillir des détails, sinon précieux et sûrs, du moins originaux et intéressants de la bouche des « vieux » de Plovan sur « la vie d'autrefois » dans la paroisse, peut-être même quelques anecdotes concernant la Révolution...

Enfin, voici la réponse à la question : différentes formes de paroisse... Je te la donne, d'après le Dictionnaire historique des mœurs et coutumes de la France (Chéruel) cf. au mot : clergé.
 
« … Dès le IVe siècle, les grandes villes avaient plusieurs églises, et dans chacune un prêtre chargé d'instruire le peuple. Bientôt on bâtit des oratoires dans les campagnes. Tel fut le commencement des cures et des paroisses. Dans l'origine, les prêtres qui en furent chargés portaient le nom de cardinaux, quand ils y étaient nommés définitivement. Ce fut, seulement, au XIIe siècle qu'on commença à les nommer curés, parce que le soin (cura) des âmes leur était confié. C'étaient autant de petits évêques : … ils pouvaient dire des messes, prêcher et même baptiser aux jours solennels. Ces droits ne furent accordés qu'aux titres principaux ou églises archipresbytérales, qu'on appelait à cette époque plebes. Le prêtre qui les administrait était quelquefois désigné sous le nom de plebanus. De ces églises principales dépendaient des cures inférieures ou oratoires, qu'on a appelées plus tard succursales... »

Donc, « une paroisse est une circonscription territoriale, dans laquelle un curé ou un desservant (recteur chez nous) exerce le ministère sacerdotal : les premières s'appellent cures et les secondes succursales. » Plovan a-t-il été jadis cure, ou simplement succursale, ou bien l'une d'abord et l'autre ensuite, il me semble qu'on ne demande pas autre chose et les anciens registres te renseigneront amplement.

Et maintenant, mon cher Noël, je te quitte, tout confus de ne pouvoir te fournir une documentation plus abondante et plus vivante, heureux pourtant si j'ai pu te rendre le plus léger service.

Je garde de toi, de nos années en commun au Séminaire, le meilleur souvenir et je te donne, en terminant, rendez-vous près de Jésus et Marie.

Bien cordialement à toi en N. S. [Notre Seigneur]

Ed Mesguen   
prêtre

P. S. : mes respects, s'il te plaît, à Mr Maréchal que j'ai eu le plaisir de connaître quand il était vicaire à Moëlan. »
 
L'auteur de la lettre, Édouard Mesguen (1880-1956), ordonné prêtre la même année que Jézéquel, est alors professeur à l'école Saint-Yves de Quimper. Esprit cultivé, raison pour laquelle notre vicaire de Plovan a jugé bon de lui écrire, Mesguen est appelé à connaître une belle carrière ecclésiastique : après Quimper (1905-1913), il part enseigner l'histoire au collège de Lesneven (1914-1920), prend la direction, à son retour de la guerre, du collège Notre-Dame du Kreisker à Saint-Pol-de-Léon (1920-1932), années au cours desquelles il entre au chapitre cathédral (1923), puis devient curé archiprêtre de la cathédrale de Quimper (1932-1934) avant finalement d'être sacré évêque de Poitiers en 1934.


Portait de Mgr Édouard Mesguen en 1934

 


Mgr Édouard Mesguen le jour de son sacre à Quimper, le 22 février 1934, entouré de Mgr Adolphe Duparc, évêque de Quimper et Léon (à gauche), et d'Auguste Cogneau, son évêque auxiliaire (à droite)

 
Le vicaire de Plovan n'aura pas l'heur de suivre le brillant parcours de son condisciple. Lorsqu'il quitte Plovan en août 1914, Noël Jézéquel, qui ne s'est pas fait prier pour suivre le conseil du vieux chanoine Paul Peyron (1842-1920) – « qu'il prenne beaucoup de temps pour mener son travail à bout » –, laisse derrière lui un travail historique en chantier. Peut-être pense-t-il revenir à Plovan une fois les hostilités finies. La guerre en décide autrement. Après avoir été placé, au début du conflit, comme prêtre auxiliaire à Plozévet puis à Plouhinec, il est mobilisé en qualité d'infirmier militaire. Le recteur Maréchal retrace la suite de son parcours dans son journal :

 « Dès octobre 1914, Mr le vicaire avait été appelé à Brest comme infirmier de l'armée, auxiliaire. Ensuite il a été versé dans le service actif, à Mantes puis sur le front dans une ambulance. Le mardi 3 avril 1917, Mr le recteur reçoit de l'armée la lettre suivante :

« Le 27 mars 1917,

Mon cher ami,   

J'ai le regret de t'annoncer la mort de ton ancien vicaire Noël Jézéquel. Il a été atteint, le 24 mars, par un obus tombé sur son ambulance, installée au collège St Charles de Chauny. Il avait trois perforations de l'intestin et a succombé, hier 26 mars, à ses blessures.

Il est mort dans les sentiments les plus édifiants, après avoir reçu les sacrements de l'Eglise.

Il a été l'objet de la citation suivante : « Jézéquel Noël, Laurent, soldat de 2e classe, ambulance 2/61. Bon infirmier, courageux et dévoué, a été très grièvement blessé en service, au cours du bombardement de l'ambulance 2/61, le 24 mars 1917. »

Je ne me rappelle pas au juste la paroisse d'origine de Jézéquel. Voudrais-tu prévenir le recteur de cette paroisse et la famille ?

Jézéquel est enterré dans le cimetière communal de Chauny.

Bien à toi en N. S.

Adolphe Bellec, aumônier. »

Mr Jézéquel avait 38 ans, était prêtre depuis 11 ans et avait été nommé vicaire de Plovan le 3 février 1909. Requiescat in pace ! Nous chantons son enterrement à Plovan le jeudi 19 avril. »

La guerre prive ainsi Plovan de son apprenti historien. Guère plus versé dans les études historiques que son défunt vicaire, Jean-Marie Maréchal ne s'emploie pas à achever la notice historique entamée par Noël Jézéquel. Tout juste se contente-t-il d'ajouter, après 1928, quelques lignes concernant la chapelle de Languidou. Du plan imposé par le diocèse, seul le premier point (« description topologique ») a finalement été traité !

 
II – Un texte inédit, entre histoire et tradition orale

Voici la transcription des sept pages manuscrites, formant l'embryon de notice historique de la paroisse de Plovan :
 
« Partie historique
I. La paroisse
1. Description topologique – Limites, division ancienne en trèves, cordelées ou fréries. Nomenclature des villages, des cours d'eaux, des moulins, des manoirs. – Productions : aperçu sur l'industrie ou l'agriculture. – Curiosités naturelles – Monuments mégalithiques : dolmens, menhirs, etc. Traces de l'occupation romaine : camps, villas et bains.
 
(a) Limites.
La paroisse de Plovan est bornée au nord par Pouldreuzic, au sud par Tréogat, à l'est par Tréogat et Peumerit, à l'ouest par l'océan Atlantique.
 
(b) Nomenclature des villages.
1° Du côté de la mer, au bas de la paroisse, nous rencontrons les villages suivants : Brénévelec, Kergalen, Cruguen, Crumuny, Pratbolc'h, Kersthéphan, Ruveïn, Guellen, Palud, Nizélec, Kergüen, Stank-liou, Kerguelen, Kervardès, Palud, Palud-Trébanec, Trébanec, Kerlaben, Kervon, Ty-Tossel, Gronvel, Kergolastre, Cornlan, Kergurun-Vian, Lesvez, Kergu Kersthephan-Vian, Kergurun-Vras, Cotty, Crugou, Kerléouguy, Pompouillec, Renongard-Vian, Renongard-Vras, Kergoff, Toulancavel, Fouillic, Trébanec huela, Secret [sic], Kerdrezec, Viny, Keroualen, Kerouintin, Kernevez, Lestreguellé-Vian, Kerevet, Ty-Corn, Kerliven, Prat-ar-Groès, Mindévet, Tréménec, Ty-an-Traon.
2° Au haut de la paroisse : Kerbroher, Kervizon, Kerautret, Keryanou, Lestreguellé, Keryéré Névez, Penfrajou, Keryéré an Traon, Keryéré-al-Laë, Kervouyen, Sent, Kergroës, Cudennec, Lesnarvor, Pencleuziou, Kerzouron-Vras, Kerzouron-Vian, Kerlavantec, Kerneulc'h, Papérès, Charnellou, Pont-Dévet, Keryouen, Trusquennec, Pontécrez, Brémel, Meil-ar-Moan, Ty-Broc'h, Land-Guido-al-Laë, Croas-Pilo, Trefrank, Brezigon, Kergua, Lavanet Bras, Lavanet-Bian, Kerscaven, Pond-Land, Ty-Land, Tynancien, Kerviel, Kerglobe, Keryan, Lannouris, Meil-Herry, Land-Guido-an-Traon, Roz, Kerdrubuill, Ramage, Keruen.
Le bourg.
 
(c) Cours d'eaux et étangs.
La paroisse de Plovan possède six étangs au bord de la grève et qui ne sont séparés de la mer que par un banc de galets.
1° Le plus considérable de ces étangs est celui de Kergalen. Il occupe une soixantaine d'hectares. Cet étang est appelé vulgairement loc'h Cassard. Il y a une trentaine d'année, M. Cassard entreprit de dessécher cet étang. Il y réussit du moins en partie et y cultiva des légumes.
Aujourd'hui les tuyaux qui servaient à dessécher l'étang sont complètement détruits, de sorte que les eaux stationnent de nouveau.
L'étang de Kergalen est alimenté par la rivière de St Quido. Cette rivière sépare la paroisse de Plovan de celle de Tréogat et de Peumeurit. De l'autre coté de cette rivière, Plovan possède les deux villages de Kerjean. Ces deux villages dépendaient autrefois de la paroisse de Tréogat. Mais en temps d'épidémie, le desservant de Tréogat refusa d'administrer ses ouailles. Celles-ci s'adressèrent au clergé de Plovan qui se mit à leur disposition. Depuis lors, les habitants de ces deux villages ont continué à demander au clergé de cette paroisse le secours des sacrements et en sont les paroissiens. L'étang de Kergalen et le ruisseau de St Quido avec toute sa vallée jusqu'à une certaine distance au delà de la chapelle devait former autrefois un bras de mer. Ce bras de mer s'appelait l'Arvor. Il a donné son nom au vieux manoir de Lesnarvor. Depuis la construction de la chapelle, on l'a appelé la rivière de St Quido.
Le port de St Quido semble avoir été très fréquenté : ce qui en rend témoignage c'est l'existence d'un vieux chemin qui va directement de St Quido à Pouldavid. Les deux ports de Douarnenez et de St Quido paraissent donc avoir été en relation l'un avec l'autre.
On a trouvé des anneaux dans les rochers qui bordent cette vallée. Ces anneaux devaient servir à attacher les bateaux.
Aujourd'hui les galets empêchent la mer de pénétrer dans la rivière de St Quido, d'arriver jusqu'à la chapelle. On ne sait au juste à quelle date s'est formé ce rempart de galets qui arrête la mer. On raconte
[blanc]
2° L'étang du Guellen est alimenté par le Vouës qui a donné son nom à Lesvez.
3° L'étang de Kerguen est alimenté par le Guellé qui a donné son nom au village de Lestréguellé.
4° L'étang de Kervardès est alimenté par la source puissante du village de Kernevez.
5° L'étang de Feunteun-Vero est alimenté par une fontaine du même jour et qui est aussi très puissante.
6° L'étang de Penhors est alimenté par le ruisseau appelé Lau qui sépare Plovan de Pouldreuzic.
Tous ces étangs jettent leurs eaux à travers dans l'océan à travers les galets.
 
(d) Moulins et manoirs.
La paroisse de Plovan possède deux moulins à eau : le moulin de Meil-Herry et le moulin de Meil-Poul-Land et les moulins à vent de Land-Guido, Kerautret, Lesvez, Pompouillec.
Les manoirs occupés aujourd'hui par des cultivateurs sont les manoirs de Tréménec, de Kerguelen-Vras, de Lesnarvor.
Ces manoirs sont d'un style assez modeste.
 
(e) Production : aperçu sur l'industrie et sur l'agriculture.
À Plovan, on cultive le blé (froment, seigle, orge), la pomme de terre et les petits pois. Cette dernière culture est une très grande ressource pour la paroisse.
Au nord de À l'est de la paroisse, il y a des villages qui ont beaucoup de pommiers : ils font certaines année[s] une certaine quantité de barriques de cidres.
 
 
(d) Curiosités naturelles. – Monuments mégalithiques : dolmens, menhirs, etc. – Traces de l'occupation romaine : camps, villas et bains.
Plovan possède quelques monuments druidiques. Le plus célèbre est le tumulus de Crugou. C'est un amoncellement de terre sous lequel il y a une galerie faite de grosses pierres plates. C'est là probablement qu'on exécutait les criminels. C'est là qu'on pendait les coupables. Aussi le nom du village porte le nom de Crugou, Crougou, Crouga qui veut dire pendre.
Plovan possède à marée basse une magnifique plage couverte de sable fin.
Un fait curieux a été constaté il y a quelques années : à marée basse, le sable qui couvre la plage, ayant été enlevé par la mer, on a vu devant le village de Kervardes, l'autre coté des galets, un chemin allant droit à la mer. Les ornières étaient très apparentes, on a rencontré des vestiges de fossé sur lesquels il y avait des souches d'arbres noircies mais encore bien conservées.
Un énorme ban de galets longeant toute la côte protège la terre contre les hautes marées.
Languido
La chapelle de Land-Guido
Le style de la chapelle en ruines de Land-Guido est celui de l'époque du XII siècle. Sur un tailloir qui se trouve à terre on peut déchiffrer l'inscription suivante : « Guillelmus canonicus et Ivo de Revesco aedificaverunt istam ecclesiam ».
La chapelle possède une jolie rose Le chanoine Guillaume est indiqué comme étant attaché à la cathédrale de Quimper de 1162 à 1166 (cartulaire de la cathédrale
La chapelle possède une jolie rosace du XVe siècle. Les piles colonnes et les arcades sont du style de l'église de Pont-Croix. Cette chapelle est classée comme monument historique.
La chapelle de Land-Guido doit être une des premières églises bâties dans ce coin de terre.
 
Cette chapelle a du être une église de monastère : à 150 mètres ou à 200 de la chapelle, on a trouvé dans une garenne les ruines d'une petite chapelle ou cellule et qui s'appelle Penity c'est-à-dire ti-Pinijen. Les anciens monastère possédaient de ces cellules isolés, destinés à loger soit des coupables ou des reclus volontaires.
Cette église a été bâtie probablement par des moines venus de la Grande Bretagne.
La tradition raconte que dans un temps bien plus rapproché de nous que son origine, l'église de Land-Guido desservait Tréguennec, Tréogat et Plovan : on trouve encore les traces d'un vieux chemin qui va pour ainsi dire directement de Land-Guido au vieux bourg de Tréguennec en traversant la paroisse de Tréogat.
[complément de la main du recteur Maréchal :]
Dans les temps anciens, Languido devait être baigné par la mer. Les prairies qui se trouvent entre Tréogat et Plovan étaient le lit d'une rivière. Et la mer devait monter jusqu'à Lesnarvor. Ce sont les galets et le sable de la mer qui ont fermé l'entrée de la rivière devant l'étang de Kergalan. M. l'abbé Cabillic, de Plouhinec, vicaire à Marseille, me disait (en 1928) que les navires de Poulgoazec lorsqu'ils viennent à la pêche devant Plovan, appellent toujours ce lieu de pêche « Porz-Quido » – donc dans le temps, à Languido, il y avait un port – et il me disait aussi que son père, navigateur, a vue des cartes de marine, où le port et la rivière de Languido était [sic] bien marqués. »
 
*
 
Ici s'achève cette amorce d'histoire de Plovan composée par Noël Jézéquel vers 1912-1914. Si on se livre à un rapide commentaire de son travail, on ne peut que regretter son caractère inachevé. Tout d'abord, il serait injuste de lui tenir rigueur d'une série d'affirmations (sur la datation des ruines de Languidou ; sur l'association des mégalithes et des druides...) que l'on sait aujourd'hui périmées mais qui ne sont que le reflet des certitudes historiques des années 1910. Rappelons modestement qu'il en sera probablement de même de nos propres certitudes d'ici à 2117 ! L'intérêt du travail de Jézéquel réside à nos yeux surtout dans le travail de collecte de traditions orales alors en vigueur : sur le prétendu port de Languidou (qui n'a, à notre humble avis, jamais existé, ou n'a été tout au plus qu'un petit havre d'échouage) ; sur les noms donnés aux ruisseaux traversant la commune ; sur l'origine du lien entre le village de Kerjean et la paroisse de Plovan ; sur l'étymologie (inexacte !) du nom du village du Crugou ; sur l'entreprise d'assèchement de l'étang de Kergalan par Jean-Baptiste Cassard dans les années 1880, etc.

Il ne dit rien de l'identité de ses sources, usant à foison des pronoms indéfinis et des formules vagues : «  on a trouvé... », «  on raconte... », « la tradition raconte... ». D'après le recensement de 1911, Plovan ne comptait alors qu'une poignée d'anciens (4 octogénaires et 31 septuagénaires, pour une population de 1 587 habitants). Nés dans les années 1830 et 1840, ils ont pu connaître dans leur enfance des hommes et des femmes nés dans la seconde moitié du XVIIIe siècle...! Est-ce cette mémoire qu'on touche un peu du doigt dans le travail de Jézéquel ? On ne peut que regretter qu'il n'ait pas poussé sa démarche plus loin.
 
*
 
*           *
 
Lorsqu'au début des années 1930, Henri Pérennès s'intéresse à son tour à l'histoire de la paroisse afin d'écrire la monographie que lui a commandé le recteur Maréchal, Plovan et sa chapelle de Languidou, il ne s'appuie pas sur la tradition orale locale. Vingt ans sont passés depuis la rédaction de la notice inachevée de Jézéquel et les témoins qu'il avait interrogés ont rejoint leur créateur, emportant avec eux des histoires plus ou moins légendaires attachées à leur terre natale. La démarche des deux hommes n'est véritablement pas la même : d'un côté, Jézéquel, historien contraint, faisant appel, pour autant qu'on puisse en juger et peut-être faute de mieux, à une culture orale et populaire ; de l'autre, Pérennès, historien plus chevronné, rompu à l'art de transcrire les documents d'archives et à l'analyse des vieilles pierres, incarnation d'une culture dite savante. Certains coins de Bretagne ont eu la chance d'attirer, parfois dès les années 1810 et jusqu'à une période récente, des collecteurs de mémoires (histoires, chants, légendes, contes...), d'abord aristocrates (Barbe-Émilie de Saint-Prix, Joseph-François de Kergariou, Théodore Hersart de La Villemarqué, Jean-Marie de Penguern...), parfois hommes d'Église (François Cadic, Jean-Marie Perrot, Henri Guillerm...). Hormis le modeste travail de l'abbé Jézéquel, ce ne fut pas le cas à Plovan. Qui pouvait se douter qu'en lançant une vaste collecte de témoignages oraux sur les écoles de la commune, l'Association du Patrimoine renouait avec une tradition initiée cent ans auparavant  par un historien précurseur qui s'ignorait ?
  
Mathieu GLAZ

samedi 4 février 2017

Skol ar Seurezed Plovan

L'association du Patrimoine de Plovan est heureuse de vous annoncer la parution prochaine du livre « Skol ar Seurezed Plovan ; l'école des Sœurs de Plovan, Histoire et témoignages », 104 pages abondamment illustrées.
Le premier chapitre, signé par Mathieu Glaz, raconte l'histoire de la construction d'une école libre au sein d'une commune résolument républicaine, en pleine guerre, au milieu des tensions créées par l'interdiction des congrégations et par l'inventaire des biens du clergé. Il se termine par l'histoire des bâtiments.
Le second chapitre, signé par Marie-Claude Gloaguen, présente le personnel de l'école.
Si ces deux premiers chapitres sont émaillés d'anecdotes racontées par d'anciens élèves et enseignants, les témoignages constituent l'ensemble du troisième chapitre, organisés par Janine Brochoire, Marie-Claude Gloaguen, Pierre Gouletquer, Martine Langevin et René Lozac'h.
Les photos d'écoles sur lesquelles sont identifiés élèves et enseignantes sont regroupées à la fin de l'ouvrage.
 
 
 
De 1916 à 1984, sur la trame violente des tensions politiques, de trois guerres et de leurs séquelles, c'est le quotidien de trois générations d'enfants qui s'exprime, parfois nostalgique, parfois violent, parfois enthousiaste, toujours émouvant : « nous avions froid, mais nous n'étions jamais malades ».
 
Prix de souscription : 15 € (le prix à la vente sera de 20 €)
Frais de port : 5 €
Renseignements : pierre.gouletquer@orange.fr

dimanche 16 octobre 2016

Conférence d'Yvon Tranvouez

Les catholiques bretons et leur école, 19ème-21ème siècle
 
À la différence de ce qui se passe dans la plupart des autres régions françaises, l’enseignement catholique breton accueille encore aujourd’hui une proportion notable des enfants scolarisés (40% dans le Finistère). On essaiera de préciser ce tableau, d’en expliquer les origines historiques et d’expliciter les trois batailles successives menées par l’école catholique : celle de la liberté, celle de la subvention, celle de l’identité.
 

samedi 9 juillet 2016

Conférence de Patrick Galliou

Traditionnel rendez-vous estival de l'Association du Patrimoine de Plovan, la conférence du 15 juillet 2016 sera cette année animée par Patrick Galliou, éminent historien, spécialiste de l'Armorique romaine. Il viendra plus particulièrement nous parler des Osismes, peuple de l'occident gaulois, qui occupaient voilà deux millénaires notre actuel Finistère ! Rendez-vous vendredi 15 juillet à 17h à la salle polyvalente de Plovan (entrée 3 euros).
 
 
Occupant, dans l'Antiquité, un vaste territoire, correspondant aujourd'hui au département du Finistère et à la partie occidentale des Côtes-d'Armor, les Osismes, dont le nom, d'origine celtique, signifie les "Ultimes" - soit les Finistériens avant la lettre - ont, de ce fait, longtemps été considérés comme un peuple marginal et de peu d'intérêt, tant leur situation jugée périphérique, paraissait les avoir tenus éloignés des grandes mutations que connut l'Europe au cours de la Protohistoire et de l'époque romaine. L'étude détaillée de l'organisation des activités et de l'évolution de ce peuple durant ces deux millénaires montre clairement, au contraire, que ce tropisme continental et peu pertinent, les Osismes, en raison de leur localisation éminemment maritime, ayant, tout au long de leur histoire, entretenu des contacts, culturels et économiques, avec une grande partie de la façade atlantique de l'Europe. Du Bronze final, où le "complexe de l'épée en langue de carpe" unit des communautés établies au Sud de la péninsule ibérique aux îles britanniques, jusqu'aux siècles de la période romaine, où ils surent parfaitement s'intégrer au monde nouveau né de la confluence des modes et pratiques impériales et des coutumes des provinces conquises, les Osismes adoptèrent, à leur rythme et au gré de leur culture, les innovations politiques, culturelles et technologiques qui naissaient dans toute l'Europe occidentale, donnant ainsi naissance à une civilisation originale et remarquablement vivante.

mardi 21 juin 2016

Lectures avec Alexis Gloaguen

Le dimanche 3 juillet prochain, à 17h00, dans la salle Ti an Dudi, l'écrivain Alexis Gloaguen, né le 19 avril 1950 dans l'école de Plovan où ses parents, Paulette et Alexis Gloaguen, étaient instituteurs, présentera son parcours et lira plusieurs de ses textes, liés aux différentes étapes de sa vie.
 
 
De Plovan au Centre-Bretagne, en passant par une enfance en Nouvelle-Calédonie, une vie d'enseignant de philosophie en Bretagne (essentiellement à Vannes) et dix-huit années Saint-Pierre et Miquelon où il a dirigé un institut de langue française orienté vers le Canada et les Etats-Unis, Alexis Gloaguen a connu un parcours où l'écriture, la réflexion, l'observation de la nature et les voyages (en particulier dans les mégalopoles d'Amérique du Nord) ont tenu une grande place. Auteur d'une quinzaine de livres, il a été publié aussi bien par les éditions Calligrammes (Quimper) que par Maurice Nadeau à partir de 2009. Invité par l'Association du Patrimoine à Plovan, il s'entretiendra avec le public sur ces différents sujets.


 

lundi 25 avril 2016

Fête du train carottes

Les dimanche 15 et lundi 16 mai prochains, à l'occasion du weekend de la Pentecôte, l'Association du Patrimoine de Plovan organise une « fête du train carottes ».
 
Les réjouissances s'ouvriront dimanche  15 mai en fin d'après-midi par une conférence de l'historien Serge Duigou sur le train carottes. Rendez-vous à la salle polyvalente de Plovan à 17h30. Entrée : 3 euros.
 
 

Fête du train carottes à Plovan

 
Le lendemain, lundi 16 mai, à partir de 14h, la fête continue à la « gare » (cliquez pour voir le site sur la carte), ancien arrêt du train carottes entre Jarnellou et Penfrajou.
Au programme, différentes animations : musique (sonneurs, chants) ; saynète ; présence de personnes en costumes bretons des années 1910-1920 ; jeux d'antan (lancer d'anneaux, sabot, casse-boîtes, jeu de quilles, palets) ; billard ; loterie (nombreux lots à 1 euro)... Sur place, on trouvera café, gâteaux et bar. Entrée libre.
 
 

mardi 5 avril 2016

Les moulins de Plovan

Le vent et l'eau... Bien des siècles avant nos modernes éoliennes et nos hydroliennes expérimentales, les hommes ont su domestiquer l'énergie produite par ces éléments. Moulin à vent comme moulin à eau sont attestés dans l'Histoire plusieurs siècles avant notre ère dans l'Orient ancien. Ils se sont répandus en Europe plusieurs centaines d'années plus tard, marquant entre autres signes le passage de l'Antiquité au Moyen Âge, et ont continué à fonctionner jusqu'à un passé récent. Le charme de ces lieux et le souci de préserver le patrimoine local ont amené quelques passionnés à restaurer ou à édifier des moulins au cours des dernières années. Au plus près de nous, c'est particulièrement vrai dans le Cap-Sizun : du moulin de Tréouzien à celui de Keriolet, en passant par Trouguer, les initiatives n'ont pas manqué et suscitent l'intérêt des touristes comme des locaux, pour qui ces belles mécaniques, autrefois si communes, sont devenues de véritables attractions. Qu'en est-il des moulins à Plovan ? Voici un premier bilan de nos recherches.
 

Moulin en pierres du Trouguer


Petit moulin en bois du Trouguer, typique du Cap Sizun


 
À Plovan, les moulins ont presque tous disparu et sont pour beaucoup oubliés. Quelques noms de lieux – Moulin-Henri, Meil ar Moan, moulin de Pontalan – ou les souvenirs de certains anciens ont conservé jusqu'à nos jours la trace de leur existence passée. Mais dans la plupart des cas, seuls de vieux actes notariés ou des cartes usées peuvent encore en témoigner.


Extrait de la carte de Cassini (1783)


En l'état de nos recherches, on peut affirmer qu'au moins dix moulins ont existé sur la commune : deux moulins à eau (Pontalan et Moulin-Henri) et huit moulins à vent (Ty Lan, Trébannec, Kerguelen, Crugou, Tréménec, Trusquennec, Kerilis et Meil ar Moan). C'est peu en comparaison des communes limitrophes : sur Pouldreuzic, l'association du patrimoine en a recensé dix-sept ; à Plozévet, on en comptait pas moins de vingt ! À l'inverse, d'après certaines sources, il en aurait existé seulement six à Peumerit (quatre à eau : Moulin Trévan, Moulin Troyon, Moulin Kervignol et Moulins Verts ; deux à vent : Meil Coz, au nord du bourg, et Lespurit Coat) et autant à Plogastel... Ces nombres sont liés en grande partie à la géographie de chaque commune : évidemment, plus elle est étendue, comme Plozévet, plus elle a de chance d'en compter. Mais plus encore, ce nombre est fonction du relief et de l'importance des cours d'eau que recèle chaque territoire. Si Plovan compte plusieurs vallons parcourus par des ruisseaux, alimentant les étangs qui bordent le littoral, elle n'a qu'une seule vallée propice à l'implantation des moulins à eau, celle traversée par la rivière Quido, nous séparant des communes de Tréogat et de Peumerit et qui se jette dans l'étang de Kergalan. Quant aux moulins à vent, énergie qui n'a jamais manqué dans notre commune littorale, ils ont sans l'ombre d'un doute été plus de huit mais on n'en a pas encore retrouvé la trace...!

Localisation des moulins de Plovan


À l'origine, il est probable que ces moulins dépendaient de petites seigneuries plovanaises dont les sujets avaient obligation d'y faire moudre leurs grains. Le moulin de Pontalan était lié au manoir de Lesnarvor. Les moulins de Tréménec, du Crugou ou de Trébannec, portant des noms de lieux connus pour avoir abrité des manoirs nobles dès le Moyen Âge, présentent peut-être le même cas de figure. Des recherches plus approfondies permettraient certainement de mieux cerner l'histoire de leurs semblables.
 
Nous avons tenté d'identifier pour chacun d'eux, dans la mesure du possible, leur localisation, leur description, leurs propriétaires et leurs exploitants.
 
 
Moulin de Pontalan
 
1° Localisation et description : ce moulin à eau se situe à proximité de la route départementale reliant le bourg de Tréogat à celui de Pouldreuzic, au sud-est du carrefour de Jarnellou.


Extrait de la section A2 du cadastre de 1828



De tous les moulins de Plovan, c'est celui dont le bon fonctionnement a nécessité le plus d'aménagements. Comme on peut le voir sur le plan ci-dessus, le moulin n'est pas placé sur le cours d'eau principal qui passe quelques mètres plus bas. Le volume d'eau et la force fournie par cette seule rivière n'étant sans doute pas suffisants, il est exclusivement alimenté par deux biefs qui se rejoignent en amont de Pontalan, formant deux étangs vraisemblablement d'altitudes différentes, de façon à créer une chute d'eau dont l'écoulement permet d'actionner la roue horizontale placée sous le moulin. L'eau détournée est ensuite relâchée dans le cours d'eau principal qui poursuit son parcours jusqu'au Moulin-Henri et, au-delà, vers l'étang de Kergalan.
Le bief 1, le plus petit, détourne sur environ 650 m. l'eau de la rivière Quido une fois qu'elle a passé les Moulins-Verts, en Peumerit, situés quelques centaines de mètres en amont. Le bief 2, beaucoup plus long, détourne l'eau d'un ruisseau affluent au cours d'eau principal dont le cours normal, après avoir traversé Pouldreuzic, passe sous la route départementale entre Lesnarvor et Papérez, poursuit son chemin jusqu'à Pont-Devet et se jette dans la rivière quelques dizaines de mètres plus loin, en contrebas du moulin de Pontalan. Sur plus d'1 km, le second bief détourne l'eau de ce ruisseau affluent à hauteur de Papérez, serpente entre la départementale et le lit normal du ruisseau, passe sous la route communale Penfrajou-Jarnellou puis sous la route départementale au niveau de Ty-Lan avant d'atteindre le moulin...! Belle prouesse quand on imagine les efforts qu'il fallut fournir pour cette réalisation et pour son entretien, avec l'impérieuse nécessité de respecter une légère pente pour permettre l'écoulement de cette précieuse eau.

Appelé autrefois moulin de Lesnarvor (par exemple dans un acte de 1857), il dépendait sans doute avant la Révolution de cet important manoir situé à 1 km au nord-ouest.

 

Porche et manoir de Lesnarvor (vers 1930-1940)


L'appellation « Pontalan » existe en parallèle de celle de moulin de Lesnarvor et pourrait également être ancienne. Elle connaît quelques variantes : en français, on trouve Pont a Land, Pont-a-lan, Pont Allan ; en breton, on dit « Meil Boulan ». Ce nom indique l'existence d'un pont pour franchir la rivière sur la route de Pouldreuzic à Tréogat. Le terme « lan », qu'il faut peut-être rapprocher du nom de la ferme voisine, « Ty lan », ne signifie pas ici ermitage mais plutôt lande.
Non loin de là, à 460 m. au nord du moulin à eau, existait aussi, au milieu du XIXe siècle, un moulin à vent construit à égale distance de Ty Lan et de Ty Nancien. La carte d'état-major ne laisse pas de place au doute : le moulin de Pontalan et les Moulins-Verts (en Peumerit) sont bien indiqués en fond de vallée et distincts de ce troisième moulin construit sur le plateau, à 46 m. au dessus du niveau de la mer.
 

Extrait de la carte d'état-major (entre 1820 et 1866)


On ignore pour l'instant de qui dépendait ce moulin à vent, qui y travaillait et ce qu'il est devenu. Peut-être était-il employé par les meuniers de Pontalan lorsque l'eau venait à manquer ?

2° Propriétaires et meuniers : pour l'instant, nos informations ne remontent pas au-delà du XIXe siècle. En 1857, le moulin de Pontalan appartient à Jean Baptiste Charles Dodun (1802-1863), marquis de Keroman, propriétaire et officier de la Légion d'honneur résidant à Paris.

Pendant cinq générations, des années 1830 aux années 1960, c'est la famille Thomas-Gentric-Tanguy qui exploite le moulin de Pontalan puis s'en rend propriétaire. Son activité a probablement cessé à la mort d'Alexis Tanguy en 1963. Le moulin appartient toujours à cette famille de nos jours.  

Dates
Meuniers
?
?
1836-1849
 Corentin Thomas, meunier
06/1836
Jean-Marie Guéguen, garçon-meunier
1849-1851
Marie Berrivin, veuve Thomas, meunière
1837 ?-1883
Pierre Gentric, meunier
1850-1851
Corentin Le Bolzer, garçon-meunier
1861
Gorgon Toullec, garçon-meunier
1881-1920
Michel Tanguy (1), meunier
1886-1901
Michel Gentric, meunier, beau-frère de Michel Tanguy (1)
1911-1962
Michel Tanguy (2), meunier
1930 ?-1963
Alexis Tanguy, meunier


Ces cinq générations comprennent : 

1°) Corentin Thomas (né à Lesvez en Plovan le 22 floréal an III / 11 mai 1795 – mort le 16 avril 1849), de Kervouyen, et Marie Berrivin (née à Peumerit le 19 ventôse an VIII / 10 mars 1800 – morte à Pontalan le 1er septembre 1857), de Kerscaven, mariés à Plovan le 14 avril 1815, qui s'établissent et exploitent le moulin dès les années 1830-1840. Ils emploient notamment Jean-Marie Guéguen, garçon meunier âgé de 42 ans, en 1836. Ils sont parents d'au moins 8 enfants, dont Jeanne Thomas, leur fille aînée qui leur succède.

2°) Jeanne Thomas (née à Plovan le 12 décembre 1819 – morte à Plovan le 1er avril 1858), qui se marie à Peumerit le 7 mai 1837 avec Pierre Gentric (né à Kerguelmès en Peumerit le 9 juin 1814 – mort au moulin de Pontalan le 1er avril 1883). Ils sont parents d'au moins 10 enfants, dont Pierre Gentric junior (1851-1882) qui devient cultivateur à Ty Lan.

Veuf de Jeanne Thomas en 1858, Pierre Gentric senior épouse en secondes noces Marie Burel (née à Plovan le 22 juin 1836 – morte au moulin de Pontalan le 28 avril 1905), de Kergorentin, de 21 ans sa cadette, qui lui donne 5 autres enfants. C'est l'un des enfants de ce second lit – une nouvelle fois la fille aînée : Marie-Jeanne Gentric – qui reste au moulin.

Dans les années 1850-1860, plusieurs domestiques travaillent comme meuniers chez eux : Corentin Le Bolzer, en 1850-1851 ; René Douguet, en 1856 ; Gorgon Toullec, en 1861-1866.

 

3°) Marie-Jeanne Gentric (née au moulin de Pontalan le 23 octobre 1860 – morte au moulin de Pontalan le 22 décembre 1920) épouse Michel Tanguy (1) (né à Porsgall en Peumerit le 1er février 1851 – mort après 1920). S'ils n'emploient aucun domestique dans les années 1880-1910, ce qui manifeste peut-être un certain déclin de leur activité minotière, ils donnent néanmoins naissance à 14 enfants entre 1879 et 1905. Leur fils aîné Michel Tanguy (2) leur succède.
 
4°) Michel Tanguy (2) (né à Plovan le 12 janvier 1887 – mort au moulin de Pont-Land le 28 mars 1962) et Marie-Louise Cosquer (née à Kergua en Plovan le 10 octobre 1892 – morte à Plovan le 3 août 1957), mariés à Plovan le 27 septembre 1911. Ils sont parents d'Alexis Tanguy (1912-1963), représentant la cinquième et dernière génération de meuniers de cette famille à Pontalan. 
 
 
Moulin Henri
 
 1° Localisation et description : il s'agit d'un moulin à eau situé en amont de l'étang de Kergalan et de Pont-Quido, sur le cours d'eau (appelé la rivière Quido) séparant Plovan et Tréogat.
 

Extrait (1/2) de la section B du cadastre de 1828

 
Sur ces extraits du cadastre, on voit qu'une réserve d'eau a été aménagée en amont du moulin. Un petit canal, que le meunier ouvre ou ferme selon ses besoins à l'aide d'une trappe, permet de faire passer, sous le moulin, l'eau accumulée dans la réserve, actionnant au passage une roue horizontale qui produit l'énergie nécessaire à moudre le grain. La force de l'eau n'étant pas suffisante, le moulin est équipé d'un moteur à pétrole dès les années 1930 (pendant l'Occupation, des habitants de la côte viennent de nuit avec quelques kilos de grain et une bouteille remplie de pétrole pour faire fonctionner le moteur) avant d'être relié au réseau électrique en 1940.
 

Extrait (2/2) de la section B du cadastre de 1828

 
L'existence du moulin est attestée depuis le début du XVIIe siècle mais il est certainement bien plus ancien. Appelé Moulin-Henri ou « Moulin d'Henry » dans les actes notariés, il est connu des anciens plovanais sous le nom de « Meil Heri ». Aucune explication ne s'impose quant à l'origine de ce nom : tout simplement un meunier ou une famille appelés Henri ?

Le moulin d'origine a aujourd'hui disparu. Restauré après avoir vu sa façade s'effondrer en 1976, le bâtiment était en trop mauvais état pour être conservé ; une construction neuve l'a remplacé au début des années 2010.
 

Intérieur du moulin avant les travaux (photo M. et Mme Primot)

 

Mécanisme de la roue encore en place (photo M. et Mme Primot)

 

Mécanismes du moulin démontés (photo M. et Mme Primot)

 
Cette nouvelle construction a conservé un linteau de pierre de l'ancien bâtiment qui porterait la date « 1777 ». Initialement, cet unique bâtiment de forme rectangulaire servait à la fois de moulin, d'habitation et d'abri pour quelques animaux. En 1905, une extension lui a été adjointe au nord, accueillant au rez-de-chaussée les bêtes et, à l'étage, la famille du meunier.

D'une superficie de départ de 60 a. 90 c., la modestie de la propriété a poussé la famille Guéguen, propriétaire du moulin depuis la fin du XIXe siècle, a acquérir quelques parcelles supplémentaires alentour pour diversifier ses activités. Dans les années 1960, parallèlement à leur moulin, Jean et Joséphine Guéguen se lancent dans l'élevage intensif de volailles. Ils font construire un des premiers poulaillers industriels de Plovan. À la mort de Jean Guéguen en 1972, alors également maire de Plovan, le moulin cesse de fonctionner.
 
2° Propriétaires et meuniers : le moulin dépend jusqu'à la Révolution de la seigneurie de Kersaudy, dont le siège est un manoir situé dans la paroisse de Pouldreuzic. En 1767, cette petite seigneurie est associée à celle de Penguilly en Peumerit. Elles appartiennent à une famille noble du Cap-Sizun, les De La Porte. 

Dates
Propriétaires
   1767
Jean Claude de La Porte, seigneur du Bourouguel, et son frère Louis Hyacinthe de La Porte, seigneur de Kerellou.
   1838
Guillaume François Kersaudy et Louise Poulhazan, de Lezanquel en Cléden-Cap-Sizun.
?-1875
Alain Guéguen, de Lesmenguy en Tréogat.
   1875
Jean-Marie Lautrédou et Caroline Le Guellec, de Ty Broc'h en Plovan.
1875-1904
Jean-Marie Guéguen, meunier.
1904-1907
Héritiers de Jean-Marie Guéguen.
1907-1916
Corentin Guéguen, meunier.
1916-1976
Héritiers de Corentin Guéguen.
 
En 1838, le moulin appartient au couple Kersaudy-Poulhazan, de Lezanquel en Cléden-Cap-Sizun. Il est par la suite acquis par Alain Guéguen, de Lesmenguy en Tréogat. Moulin-Henri change plusieurs fois de mains au cours de la seule année 1875 : mis en vente pour 4 000 francs par décision du tribunal civil de Quimper à la demande des héritiers d'Alain Guéguen (15 février 1875), il est acquis par les époux Jean-Marie Lautrédou et Caroline Le Guellec, de Ty Broc'h en Plovan (21 avril 1875) pour être revendu 6 000 francs quelques semaines après à Jean-Marie Guéguen (26 septembre 1875), fils du susdit Alain Guéguen.

Entre 1767 et 1838, une famille Le Goff exploite les lieux en tant que locataires. Yves Le Goff, meunier vivant à Lanouris huella en 1831, est certainement le meunier du Moulin-Henri. En 1838, le moulin change de mains : il est loué par Alain Guéguen, de Lesmenguy en Tréogat, qui en acquiert par la suite le fonds. Entre 1838 et 1874, il semble que Moulin-Henri soit inhabité, les recensements de population des années 1840-1850 n'y signalant personne. Alain Guéguen fait peut-être fonctionner son moulin en continuant à résider à Lesmenguy. Lors de sa succession en 1875, on apprend qu'il est devenu propriétaire des lieux (à une date qui reste à déterminer).

Le moulin retrouve un occupant dès 1874 en la personne de Jean-Marie Guéguen, un des enfants d'Alain, établi sur place comme meunier. Il loue la propriété de Moulin-Henri à ses frères et sœurs avant, l'année suivante, d'en devenir propriétaire. Il épouse Catherine Le Gall, veuve d'André Loussouarn, de Lanouris, en 1877. Ils vivent à Lanouris (1881-1886) avant de retourner s'installer au moulin (avant 1891). Ce couple est à l'origine de la famille Guéguen de Moulin-Henri, qui occupe toujours les lieux.


   Dates
Meuniers
v. 1725-1727
Joseph Bober et Marie Dumoulin ?
v. 1739-1741
Françoise Le Bannec, épouse de Jean Gouletquer ?
   1767

v. 1767-1774
Jean Le Goff, veuf de Jeanne Autret. Enfants mineurs.

Inventaire des biens de Jean Le Goff.
   1831
Yves Le Goff, meunier, marié à Catherine Mével.
1836-1838
Catherine Mével (née vers 1776), veuve d'Yves Le Goff, meunière. En 1836, elle vit avec sa nièce Marie Goff (née vers 1828) et 3 employés :
  • Jacques Gentric (né vers 1786) garçon-meunier.
  • Jean Baloin (né vers 1822), domestique.
  • Marie Madec (né vers 1811), domestique.
?
?  
1875-1904
Jean-Marie Guéguen (1844-1904), époux de Catherine Le Gall, meunier.
En 1886, il a 4 domestiques (dont les 3 enfants du premier mariage de Catherine Le Gall) :
  • Yves Loussouarn, 18 ans,
  • Jean-Marie Loussouarn, 14 ans
  • Marie (Louise?) Loussouarn, 14 ans
  • Marie Jeanne Queneudec, 18 ans.
1904-1914
Corentin Guéguen (1887-1916), époux de Jeanne Colin, meunier. Il est mobilisé en 1914 et meurt en 1916.
1914-1919
Jeanne Colin (1889-1963), veuve Guéguen à partir de 1916, meunière.
1919-1948
Jean-Louis Le Roux (1893-?), second époux de Jeanne Colin, meunier.
1948-1972
Jean Guéguen (1913-1972), époux de Joséphine Bourdon, meunier.

Moulin-Henri a donc vu se succéder quatre générations de meuniers Guéguen, comme locataires puis comme propriétaires-exploitants :
 
1°) Alain Guéguen (né à Peumerit le 29 avril 1816 – mort à Tréogat le 27 novembre 1874) et Jeanne Bonizec (née à Tréogat le 15 novembre 1818 – morte à Lesmenguy le 29 juillet 1869), mariés à Tréogat le 20 octobre 1835, domiciliés à Lesmenguy en 1838-1874.

2°) Jean-Marie Guéguen (né à Tréogat vers 1844 – mort à Moulin-Henri le 22 mars 1904), fils des précédents, meunier célibataire à Moulin Henri entre 1874 et 1877, avant de se marier en juillet 1877 avec Catherine Le Gall (née à Plogastel-Saint-Germain le 11 novembre 1841 – morte à Moulin-Henri le 3 décembre 1915), veuve en premières noces d'André Loussouarn (1841-1876) avec qui elle s'était mariée en 1862 et dont elle avait eu 4 premiers enfants. Le couple Guéguen-Le Gall donne par la suite naissance à 3 autres enfants, dont Corentin Guéguen. 

3°) Corentin Guéguen (né à Plovan le 28 juillet 1878 – mort pour la France des suites de blessures à l'hôpital de Compiègne le 12 mars 1916), meunier et cultivateur, marié en novembre 1907 avec Jeanne Colin (née à Méot en Pouldreuzic le 17 novembre 1889 – morte à Tréogat le 25 novembre 1963).
Veuve de guerre à 27 ans avec 3 jeunes enfants à charge (Pierre Marie, Marie Jeanne et Jean Guéguen), Jeanne Colin se remarie à Plovan le 29 octobre 1919 avec Jean Louis Le Roux (né le 21 juillet 1893 à Tréogat – mort après 1948), qui s'installe comme meunier à Moulin-Henri de 1919 à 1948.  

4°) Jean Guéguen (né à Moulin-Henri le 8 novembre 1913 – mort à Plovan le 18 novembre 1972), meunier et cultivateur, propriétaire à partir de 1948, marié à Plovan le 1er avril 1945 avec Joséphine Bourdon (née à Plovan le 1er décembre 1919 – morte à Plovan le 28 novembre 2001). Il est maire de Plovan entre 1968 et son décès en 1972. À sa mort, le moulin cesse d'être utilisé.

Moulin de Kerilis

1° Localisation et description : aujourd'hui disparu, le moulin à vent de Kerilis était situé entre la ferme du même nom et celle de Lanouris. 
 

Extrait de la section B du cadastre de 1828

  

Montage d'extraits des sections C1 et B du cadastre de 1828



Il est appelé aussi moulin de Kerilis Quideau ou de Languidou.  Son existence est ancienne. Un acte de 1621 évoque à plusieurs reprises un « moullin de Cochen » ou « le sentier menant de Querillis Quideau audict moullin de Cochen ». S'agit-il de l'ancienne appellation du moulin de Kerilis ? À la différence des moulins à eau, il semble en effet courant que les moulins à vent changent de noms en fonction de la ferme dont ils dépendent. Ce moulin à vent a probablement été démoli dans les années 1920, précédant de peu ceux du Crugou et de Tréménec. Venant régulièrement de Tréogat à pied à travers la vallée dans les années 30, une ancienne élève de l'école des sœurs de Plovan, née en 1924, ne se souvient pas d'avoir vu un moulin à vent dans le paysage lorsqu'elle passait les petits ponts de Kerguen ou quand elle se rendait en ballade scolaire dans les ruines de la chapelle.
 
Si on n'a pas trouvé de photo le figurant, on sait qu'une reproduction de l'édifice a été réalisée par Oscar Thomas (1905-1975), le sauveur bien connu des ruines de Languidou, lors de sa captivité au camp de Saumur en 1940. Il a profité de ce temps de repos forcé pour fabriquer trois maquettes de moulins en bois, en fer et en toile, dont l'une reproduisait celui de Languidou. « L'une d'elles, précise un article du Ouest-Éclair à la veille de Noël 1940, mesure 1 mètre de hauteur ; les deux autres cinquante centimètres. Dans la plus grande, tout a été respecté. C'est le vieux système du moulin : les ailes et la meule tournent. L'un des moulins est destiné à la marraine de l'auteur ; les deux autres pour être mis en vente au profit des prisonniers du camp de Saumur. Mais, comme la vente serait difficile, M. le Sous-Préfet a décidé de faire une tombola pour ces deux moulins. À partir d'hier dimanche, nos concitoyens peuvent admirer ces chefs-d'œuvre à la vitrine de M. Pusseau, rue d'Orléans, tailleur, à Saumur, où l'étalage a reçu une décoration particulière à cet effet. ». On peut supposer que la grande maquette était celle du moulin qu'Oscar Thomas, natif de Plovan, connaissait le mieux, celui de Languidou. On ignore malheureusement ce que ces 3 œuvres sont devenues par la suite. Si jamais la maquette de Languidou existe encore, elle serait le dernier et sans doute l'unique témoignage de l'apparence de ce moulin à vent.

2° Propriétaires et meuniers : sans doute occupé par la famille Stum ou Rozel dans les années 1820, le moulin est exploité dans les années 1830 à 1850 par Étienne Le Coz et Mauricette Stum. Il passe par héritage à une petite-fille de cette dernière et à son mari, Marie-Anne Gadonna et Sébastien (Le) Goff, meuniers en 1856. Il est ensuite probablement vendu à Jean-Marie Thomas (1), cultivateur originaire de Lesvez et installé à Kerilis izella vers 1850, car cette famille emploie des garçons-meuniers dans les années 1860-1870. Le moulin est probablement détruit au début des années 1920 par la quatrième génération de Thomas.

Dates
Meuniers
?
?
1836-1851
Étienne Coz, meunier. Marié à Mauricette Stum.
1856
Sébastien Goff, meunier. Marié à Marie-Anne Gadonna, petite-fille de Mauricette Stum.
1861 ?-1872
Jean-Marie Thomas (1), meunier en 1872.
1861
René Douguet, né vers 1830, garçon-meunier chez Jean-Marie Thomas (ancien domestique du moulin de Pontalan ?).
1872
Daniel Clorennec, né à Lababan vers 1841, domestique meunier chez Mathieu Thomas, fils de Jean-Marie Thomas.
1876
Jean Le Corre, né à Plonéour vers 1856, domestique meunier chez Mathieu Thomas.
1892-1906
Jean-Marie Thomas (2), meunier, fils de Mathieu Thomas.
1921-1922
 Jean-Marie Thomas (3), meunier, fils de Jean-Marie Thomas (2).

Les quatre générations de Thomas qui tiennent le moulin entre les années 1850 et les années 1920 se composent de :
 
1°) Jean-Marie Thomas (1) (né à Lesvez le 26 juillet 1820 – mort à Plovan le 31 mai 1887) et Marie Gentric (née à Plovan vers 1823 – morte à Kerilis le 5 octobre 1899), cultivateurs à Kerilis izella en 1851-1861, propriétaire en 1861.

2°) Mathieu Thomas (né à Plovan le 17 octobre 1844 – mort à Languido le 20 janvier 1916), fils des précédents, et Marie-Jeanne Le Brun (née à Plovan le 20 novembre 1843 – morte à Languidou le 15 novembre 1911), son épouse, également installés comme cultivateurs à Kerilis en 1872. Bien qu'on n'ait pas trouvé Mathieu Thomas qualifié directement de meunier, il poursuit bien les activités de son père puisqu'il emploie chez lui plusieurs domestiques meuniers.

3°) Jean-Marie Thomas (2) (né à Plovan le 7 août 1864 – mort à Languido le 16 mars 1922), fils des précédents, meunier à Kerilis/Languidou en 1892-1922, marié à Plovan le 20 mai 1896 avec Marie-Louise Baloin (née à Plovan le 18 mars 1878 – morte à Languido le 25 juin 1963), de Kerluantec.
 
4°) Jean-Marie Thomas (3) (né à Kerillis le 21 janvier 1898 – mort à Plovan le 7 février 1955), meunier à Languido en 1922, marié à Plovan le 21 avril 1921 avec Marguerite Kerouédan (née à Kerguä le 12 juillet 1900 – morte à Languido le 4 novembre 1962). à notre connaissance, il est le dernier membre de cette famille à exercer l'activité de meunier. Ses fils Jean-Marie Thomas (4) (1922-2006) et Georges Thomas (1923-2012) sont demeurés à Plovan.


Moulin du Crugou

1° Localisation et description : ce moulin à vent, aujourd'hui disparu, était autrefois situé non loin de la route allant du bourg de Plovan vers Kerléoguy, au niveau de l'embranchement menant au Crugou. 

Extrait de la section C1 du cadastre de 1828


Signalé dès le XVIIIe siècle, son existence remonte sans doute bien au-delà. Son nom n'a cessé d'évoluer au gré de ses propriétaires : appelé moulin du Crugou sur le cadastre de 1828 (en référence à un ancien lien entre le moulin et ce village ou par rapprochement logique, le moulin étant situé dans un champ appelé « trest ar hrugou » ?), il est dit « Meil-ar-Viny » en 1831 lorsque Mathieu Le Bec, de Viny, le vend à Daniel Thomas, de Lesvez. Il est ensuite dit moulin de Lesvez jusqu'à sa vente en 1921 à Corentin (Le) Bec, de Renongard vihan, qui s'y installe avec sa famille.

Là encore, on n'a pas trouvé de photographie du moulin. Mais on en connaît une description par un curieux concours de circonstances. On a évoqué plus haut les maquettes de moulins réalisées par Oscar Thomas en 1940. L'individu n'en était pas à son coup d'essai puisque dès 1930, alors qu'il était immobilisé pendant plusieurs semaines suite à un accident, Oscar Thomas avait mis ce temps à profit pour réaliser une première maquette de moulin à vent reproduisant le moulin du Crugou (appelé encore moulin de Lesvez).

L'histoire est rapportée par le journal Ouest-Éclair du 23 août 1930 : « L'ingénieux et patient cultivateur se mit au travail, prenant pour modèle le moulin de Lesvéis, situé au bord de la route de Plovan à Penhors. En trois mois, il en fit une reproduction exacte, utilisant le bois, le fer blanc, le papier de verre, jusqu'à l'herbe même qu'au moyen de colle il fixa sur un plateau pour donner l'illusion du gazon. Rien ne manque en effet, à ce petit chef-d'œuvre. Les ailes garnies d'une étoffe en soie font tourner à l'intérieur la petite meule dans un bruit caractéristique analogue à celui d'un vrai moulin. Un escalier monte jusqu'au faîte où un petit entonnoir en bois est disposé pour recevoir le grain. Le toit conique à souhait, est muni de sa longue perche et tourne sur lui-même, au gré du meunier, pour la meilleure utilisation du vent. ». Comme pour ses autres maquettes, on ignore ce que ce travail, exposé en août 1930 dans une vitrine des Grands Magasins Saint-Rémy, rue du Parc à Quimper, est devenu par la suite.
 

2° Propriétaires et meuniers : l'histoire de ce moulin est plus mouvementée que celles de ceux que nous avons vu jusqu'à présent. Il appartient au début du XIXe siècle à Yves Le Goyat et Catherine Hélias, qui le vendent à Mathieu Le Bec et Louise Le Quéffélec, de Viny, le 13 juillet 1824, à charge pour les acquéreurs de payer une rente foncière de 15 francs à Mme veuve de Madec. Mais suivant un acte de 1827, les mécanismes du moulin appartiennent à Daniel Thomas, de Lesvez.
Une nouvelle vente du « moulin à vent du Vény » intervient le 17 avril 1831 : Mathieu Le Bec et ses enfants le cèdent audit Daniel Thomas, de Lesvez. Il va dépendre de cette ferme jusqu'en 1921, les meuniers étant des domestiques employés par la puissante famille Thomas-Voquer puis par la famille Lautridou-Guellec qui loue la ferme à partir des années 1880. 
 

Dates
Meuniers
1836
Jean Durand, meunier, né vers 1799, fils de Marie Durand, marié en 1836. Mort chez Daniel Thomas « son maître » le 5 décembre 1836.
1841
Alain Pouchus, garçon-meunier chez les Thomas, homme marié.
1846
Gorgon Pouchus, garçon-meunier chez les Thomas, né vers 1800, homme marié.
1856
Jacques Morvan, garçon-meunier chez les Thomas, né vers 1828.
1861
Jacques Goyat, garçon-meunier chez les Thomas, né vers 1837, célibataire.  
1870-1872
Tudec Tual, garçon-meunier chez les Thomas-Voquer, né à Plovan vers 1833/1836, fils de Tudec Tual et de Marie Helou. Marié à Jeanne Le Berre, domiciliée à Stang Liou en 1872, avec qui il a deux fils, nés à Plovan : Mathias Tual (né en 1868) et Tudec Tual (né le 29 juillet 1870).
Auparavant domicilié à Kergurun (1854).
Mort à Feuteun Vero le 25 avril 1879, qualifié de meunier.

Ancien garçon-meunier des Le Pape à Kerguelen vras ?
1881
Jean Le Berre, né en 1860. Marié à Marie-Louise Nicolas, parents de Marie Le Berre, née le 2 novembre 1881.
1901
Alain Kerloch, né en 1881, domestique meunier chez François Guellec.
1906
Prosper Le Douce, né à Plozévet en 1879, domestique meunier chez François Guellec.
1921-1930 ?
Corentin Le Bec, meunier à Kergurun vihan.
 
 
En 1921, Corentin Le Bec (né à Plovan le 25 novembre 1887 – mort à Plovan le 14 mai 1975), de Renongard vihan, acquiert le moulin, la terre et l'habitation qui lui sont liées. Il s'est marié à Plovan le 23 novembre 1913 avec Henriette Marie Louise Bec (née à Kerlivin le 18 octobre 1892 – morte à Plovan le 24 juin 1969), devant Jean-Marie Le Pape, conseiller municipal.
Alors qu'il devait reprendre la ferme de Renongard, la guerre vient bouleverser son avenir. Fait prisonnier pendant la Première Guerre mondiale, il ne retrouve pas la place qui lui était destinée à son retour. Le couple achète alors une terre dépendant de Lesvez en 1921, sur laquelle existe déjà une petite maison. Le lieu s'appelle (ou est baptisé par eux) Kergurun vihan.
 
 

Maison de Corentin Bec. Quelques dizaines de mètres derrière, s'élevait son moulin

 
 
Ils construisent ensuite l'actuelle maison, toujours occupée par une de leur cinq enfants : Maria Bec (née en 1923), encore connue par certains Plovanais comme « Maria ar meilher », surnom qu'elle doit à son père, « Tin ar meilher » (Corentin le meunier). Elle se souvient d'avoir vu le moulin dans son enfance sans pouvoir préciser la date de sa démolition (dans les années 1930 ?). Une fois démoli, les pierres du moulin ont servi dans les bâtiments de leur ferme.
Outre le moulin et une petite exploitation agricole, les (Le) Bec tiennent aussi un commerce. Jean Thomas rapporte dans le bulletin municipal de 2004 que cette maison, dite « Ty Tin ar Meilhar », abrite un débit de boissons, une épicerie, un lieu de courtage de pois (pour l'usine Hénaff) et sert à l'occasion de salle de noces.
 
 
 
Moulin de Tréménec
 
1° Localisation et description : lui aussi aujourd'hui disparu, le moulin à vent de Tréménec se situait entre les fermes de Kerbroc'her, Kervison et Kerautret. Il dépendait sans doute à l'origine du manoir de Tréménec.
 

Extrait de la section C1 du cadastre de 1828

 
Appelé moulin de Tréménec sur le cadastre de 1828, il dépend avant 1853 de Kervizon. Il passe à cette date sous le contrôle de la famille Gentric du Crugou, devenant alors le « moulin du Crugou ». Encore en activité dans les années 1920, ce moulin de hauteur importante a été démoli par Jean-Louis Le Roux, meunier à Moulin-Henri, dans les années 1930. Lorsqu'il était écolier, Jean Guéguen, de Moulin-Henri, apportait son déjeuner au meunier de Tréménec pendant la pause de midi. Par la suite, les pierres ont été réutilisées à Moulin-Henri et à Kerguideau. La parcelle où était construit le moulin a dépendu de Moulin-Henri jusqu'au remembrement.

2° Propriétaires et meuniers : dans la première moitié du XIXe siècle, le moulin dépend-il encore de Tréménec ? Les recensements de 1836 et 1841 mentionnent le ménage formé par Pierre Nicolas et Marie-Jeanne Garrec, établi dans une importante ferme (avec 6 domestiques dont 1 meunier) mais dont l'emplacement n'est pas précisé. Ils hébergent les garçons-meuniers Pascal Guellec (en 1836) puis Corentin Coïc (en 1841).

Au milieu du XIXe siècle, le moulin appartient à la famille Le Pape de Kervizon. Michel Gentric, cultivateur au Crugou, l'achète en 1853. Les Gentric le conservent pendant 3 générations. En 1902, il est acquis par Corentin Guéguen, de Moulin-Henri. 

Dates
Propriétaires

Avant 1853

Yves Le Pape et Marie Le Goascoz, de Kervizon.

1853-1876

Michel Gentric, du Crugou.

1876-1899

Daniel Gentric, du Crugou.

1899-1902

Jean Gentric, du Crugou.

1902-1916

Corentin Guéguen, de Moulin-Henri.

1916-?

Héritiers de Corentin Guéguen.

 

Lorsqu'il dépend d'une grande ferme (Kervison, Crugou), le moulin est confié à des domestiques.

Dates
Meuniers
1836
Pascal Guellec, meunier ?
1841
Corentin Coïc, domestique meunier ?
1851
Jean Marie Pape (né vers 1823), meunier, domicilié chez son père Yves Pape à Kervison.
1856
Jean Salaun (né vers 1795), garçon-meunier, domicilié chez Michel Gentric au Crugou
1861
Vincent Neri (né vers 1830), garçon-meunier, homme marié, domicilié chez Michel Gentric au Crugou.
1872
Jean-Marie Lucas (né à Plobannalec vers 1836), meunier domicilié chez Jean Le Hénaff à Kerdrézec mais domestique au Crugou.
1881
Jean Hascoët (né vers 1862), meunier, domestique chez Daniel Gentric au Crugou.
1902-1914
Corentin Guéguen (1878-1916), meunier du Moulin-Henri et de Tréménec.
1919-1930 ?
Jean-Louis Le Roux (1893-?), meunier du Moulin-Henri et de Tréménec.

 

Moulin de Trébannec, moulin du Fouillé ?

1° Localisation et description : ce moulin pose une série de problèmes non encore résolus. Bâti à 26 m. au dessus de la mer, ce moulin à vent se situait au bord de la route menant du bourg de Plovan à Penhors, à proximité immédiate de Trébannec huella et du Fouillé. Le nom que nous avons choisi de lui donner n'a pas été relevé comme pour les précédents dans un texte ou sur une carte. Le moulin n'apparaît ni sur la carte de Cassini (1783) ni sur le premier cadastre (1828) mais il figure bien sur la carte d'état-major réalisée avant 1866 (symbolisé par un point rouge entouré d'un cercle de même couleur).
 

Extrait de la carte d'état-major (entre 1820 et 1866)


Son existence semble pourtant attestée dès le XVIIIe siècle : le lieu-dit « Cosmeil Trébannec » – qu'on peut traduire par vieux moulin de Trébannec – est ainsi loué à Vincent Quiniou, de Kergorentin, en 1786. Cette dénomination prouve non seulement l'ancienneté du moulin pour les hommes de la fin du XVIIIe siècle mais elle atteste aussi du lien entre l'édifice et le village de Trébannec, connu pour avoir été une seigneurie et avoir accueilli un manoir dès le Moyen Âge : le manoir de « Treffmabanec Yselaff » est attesté dès le début du XVe siècle.
Il faut peut-être rapprocher l'histoire de ce moulin de celle d'un autre édifice autrement plus ancien, situé 600 m. au sud : le tumulus de Renongard. En 1875, dans un article consacré à ce monument préhistorique, l'archéologue pont-l'abbiste Paul du Chatellier rapporte que « ayant appris qu'un cultivateur de Plovan, pour avoir les pierres nécessaires à la construction d'un moulin, avait fait ouvrir un tumulus situé sur ses propriétés, [il s'y rendit] aussitôt ». Arrivé sur les lieux, il constate que « les deux chambres étaient ouvertes, et, à l'aide de la mine, on avait déjà brisé la table unique qui les recouvrait toutes deux […] je reconnus que l'un des supports de la table, formant la paroi ouest de la chambre principale, portait des signes gravés, et je me mis immédiatement en pourparlers avec le propriétaire pour le lui acheter et le sauver de la destruction qui allait le faire disparaître. Le paysan de notre littoral est très-intéressé et il est rare qu'il résiste à une offre avantageuse, aussi je vins à bout de vaincre sa résistance, quoiqu'il m'eût objecté que cette pierre était destinée à faire les marches de son moulin. ». Louons la morgue évidente de l'auteur qui, pour se donner le beau rôle en narrant la manière dont il a sauvé cette pierre de la barbarie des paysans plovanais, nous livre de précieux renseignements sur un bien mystérieux moulin !



Pierre gravé du tumulus de Renongard qui aurait pu servir à la construction d'un moulin


La proximité de Renongard et de Trébannec huella permet de penser que c'est bien du moulin signalé sur la carte d'état-major dont il est question. Mais s'agissait-il vraiment d'une construction ou plutôt d'une rénovation ? On l'ignore. Si ce pillage amène Du Chatellier à fouiller les lieux où il découvre nombre d'objets et de dalles gravées, les autres pierres préhistoriques ont pu être employées au moulin de Trébannec. Que seraient-elles devenues dans ce cas ? Là encore, mystère. Peut-être que, du côté de Trébannec huella, traînent encore quelques pierres oubliées issues du tumulus...  

2° Propriétaires et meuniers : en rappelant l'usage qui voulait qu'on change la dénomination d'un moulin en fonction de la ferme dont il dépendait, on peut émettre l'hypothèse que ce moulin, après avoir initialement dépendu de Trébannec, soit devenu une dépendance d'un autre manoir, celui de Kergorentin. Hormis l'évocation de travaux autour d'un moulin en 1875 par Du Chatellier, s'ensuit une longue période de silence dans les sources que nous avons consultées.
Il faut attendre les années 1910-1920 pour que soit à nouveau signalé un moulin dans ce secteur, ou plus exactement un meunier : Yves Lautridou (1875-1966), cultivateur à Gronval et figure marquante de la ville communale de son temps (il a été longtemps un des leaders de la droite plovanaise dans les années 1910-1940), est en effet à plusieurs reprises désigné comme meunier, d'abord à Kergoff (1914), puis à Gronval (1920) et enfin au Fouillé (1921). S'agit-il du même édifice que celui évoqué plus haut ? Yves Lautridou serait-il alors le dernier meunier de Trébannec ? Des questions qui appellent de nouvelles recherches.


Moulin de Kerguelen vras

Localisation et description : deux annonces parues dans la presse en février 1885 et en juin 1905 confirment l'existence d'un moulin à vent dépendant, dans les années 1850-1885, de Kerguelen vras puis, de 1885 à 1905, de Pompouillec.



Extrait du journal Le Finistère en février 1885

 


Extrait du journal Le Citoyen en juin 1905

 
Absent du cadastre de 1828 comme de la carte d'état-major, sa construction pourrait être tardive et remonter au milieu XIXe siècle. On l'a fait figurer un peu naïvement sur cet extrait du cadastre !

Extrait annoté de la section E2 du cadastre de 1828


 
Si le numéro de la parcelle ne laisse pas de doute quant à sa localisation, sa désignation sous le nom de « moulin de Kerangoff » en 1885 n'est pas sans poser problème. Elle renvoie certainement au lieu-dit du même nom (aujourd'hui appelé Kergoff), situé à quelques centaines de mètres au nord du moulin, en lien sans doute avec le domicilie du meunier alors en activité. Passé 1905, on perd sa trace ; on ignore tout de sa taille et des conditions de sa disparition.
 

 
Propriétaires et meuniers :  la parcelle sur laquelle s'élevait ce moulin à vent dépendait de la ferme de Kerguelen vras, propriété de la famille Le Pape, qui possédait l'ensemble des terres numérotées sur l'extrait de cadastre ci-dessus ainsi que les terres entourant Pompouillec. Cela explique pourquoi, au XIXe siècle, on rencontre successivement des garçons-meuniers domiciliés chez les Le Pape de Kerguelen vras (1856-1861) puis des meuniers domiciliés à Pompouillec (1872-1901).
 
Dates
Meuniers
1856
Isidore Volant, né vers 1822, homme marié, garçon-meunier chez Jean Le Pape à Kerguelen vras.
1861
Tudec Tual, né vers 1842, garçon-meunier chez Jean Le Pape à Kerguelen vras.
1872
Joseph Gall, né à Pouldreuzic en 1843, meunier à Pompouillec, propriété de son beau-père, Jean Le Pape, de Kerguelen vras
1872-1881
Jean Le Berre, né à Plozévet vers 1850, garçon-meunier chez Joseph Gall (1872) puis meunier indépendant (1881) à Pompouillec.
1885
Michel Gentric, indiqué dans l'annonce de 1885 comme « cultivateur et meunier, demeurant au moulin de Kerangoff ».
À identifier avec Michel Gentric, né en 1841, cultivateur à Kergolastré en 1881 ?
1892
Joseph Hascoët, né au bourg de Pouldreuzic en 1860, meunier à Pompouillec.
Il est domestique chez Daniel Le Pape depuis 1886, qualifié de cultivateur.
Il est cultivateur à Kerdrézec en 1896, marié depuis 1894 avec Marie Galès, veuve de Jean Le Goff.
1901
Henri Sergent, né vers 1849, domestique, meunier chez Daniel Le Pape, de Pompouillec.



Meil ar Moan
 
1° Localisation et description : seul le nom de ce lieu, situé au sud-est du bourg, permet de supposer l'existence passée d'un moulin (à vent, compte tenu de son emplacement). Il est clair qu'il s'agit d'un moulin tout à fait distinct de celui de Kerilis. La plus ancienne mention que nous ayons trouvé est celle d'un « moulin Le Moann » dans le recensement de 1872.

2° Propriétaires et meuniers : en 1872, une famille Boissel vit alors dans ce lieu-dit ; elle comprend Noël Boissel, 27 ans, aide-bedeau, Marie-Jeanne Bourdon, 26 ans, sa femme, et leurs 4 enfants mais pas de meunier.
À la même date, Marie-Jeanne Le Moann, veuve Gentric, 72 ans, née à Cléden-Cap-Sizun, vit à Kerstéphan avec Jean Gentric, 47 ans, son fils unique, sa bru Marie-Corentine Le Goff, leurs 3 enfants et 5 domestiques. Faut-il établir un lien entre le nom de cette femme et le nom du moulin ?
En 1901, Jean-Marie Guéguen, auparavant meunier à Moulin-Henri, est domicilié à Meil ar Moan comme meunier, avec son épouse Catherine Gall, leur fils Pierre, 16 ans, et Corentin Guéguen, 65 ans, son frère. Hormis cet exemple, on n'a pas trouvé d'autres meuniers domiciliés à Meil ar Moan.
 
Moulin de Trusquennec
 

1° Localisation et description : ce moulin à vent moderne, bâti en béton, est probablement le dernier à avoir été construit à Plovan. Situé entre Trusquennec et Kergua, il dépendait de la ferme de Lavanet où résidait la famille Le Corre. 
 
 
2° Propriétaires et meuniers : Jean Thomas indique dans le bulletin municipal de 2004 que Jacques (Le) Corre (né à Lavanet le 9 juin 1882 – mort à Trusquennec le 1er août 1962), dit « Jakez Lavanet », en était le meunier dans les années 1950.
Jacques Corre, marié successivement à Marie Le Brun (1886-1914) puis à Rose Goyat (1896-1936), est à la tête d'une famille particulièrement nombreuses : il a eu au moins 15 enfants.

 
Moulin du bourg

 
1° Localisation et description : dans les années 1920, alors que les moulins à vent commencent à s'effacer du paysage, un moulin à moteur est installé au bourg de Plovan, dans la maison d'Auguste Raphalen. Jean-Louis Le Roux, de Moulin-Henri, le fait désinstaller en 1945.
 
2° Propriétaires et meuniers : il faut sans doute faire le lien avec Alain Pogeant (né à Kergalan le 28 février 1888 – mort à Plovan le 22 février 1966), marié à Plovan le 3 février 1924 avec Marie-Corentine Le Berre (née à Meil-Moan le 12 août 1897 – morte à Plovan le 12 juin 1977), signalé à de multiples reprises comme meunier au bourg dans les années 1925-1931. Il devient par la suite marchand de poissons.

 
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On le voit bien, l'histoire des moulins de Plovan reste encore largement à écrire, notamment pour les périodes antérieures à la Révolution. Mais si d'autres moulins et d'autres meuniers restent à découvrir, on peut dors-et-déjà dresser quelques constats. Les plus vieux moulins à vent, éléments familiers des paysages plovanais depuis plusieurs siècles, ont disparu avec une rapidité frappante au tournant des années 1920 et 1930, leurs propriétaires ne se contentant pas de cesser de les faire fonctionner mais faisant le choix de les démonter complètement. À tel point que plus un seul n'est debout aujourd'hui, ce qui rend plus ardu d'en retrouver le souvenir. Les moulins à eau, modernisés dès les années 1930, ont quant à eux continué à fonctionner jusque dans les années 1960-1970. L'histoire se poursuit désormais sous une autre forme. En effet, depuis les années 1990, alors que l'on parle de plus en plus d'énergies renouvelables, de nombreuses éoliennes, moulins d'un nouveau genre, sont venues repeupler notre horizon...!

 

Lointaine héritière du moulin du Crugou, l'éolienne de Corn Goarem, installée depuis 2012, produit du courant pour l'éclairage, le chauffage et l'eau chaude

 

Les éoliennes de Plozévet

 
Plusieurs personnes m'ont très aimablement apporté leur aide pour réaliser ce travail :
  • Maria Bec, de Kergurun.
  • Jeannine et Michel Primot, de Moulin-Henri.
  • Thérèse Thomas, de Guerveur.
  • Stéphane Le Goff, de Corn Goarem.
 
Qu'elles en soient remerciées !


Mathieu GLAZ